Le loup et l'agneau
La raison du plus fort est toujours la meilleure : Nous l’allons montrer tout à l’heure. Un agneau se désaltérait Dans le courant d’une onde pure. Un loup survient à jeun, qui cherchait aventure, Et que la faim en ces lieux attirait. Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? Dit cet animal plein de rage : Tu seras châtié de ta témérité. - Sire, répond l’agneau, que Votre Majesté Ne se mette pas en colère ; Mais plutôt qu’elle considère Que je me vas désaltérant Dans le courant, Plus de vingt pas au-dessous d’Elle ; Et que par conséquent, en aucune façon, Je ne puis troubler sa boisson. - Tu la troubles, reprit cette bête cruelle ; Et je sais que de moi tu médis l’an passé. - Comment l’aurais-je fait si je n’étais pas né ? Reprit l’agneau ; je tète encor ma mère. - Si ce n’est toi, c’est donc ton frère. - Je n’en ai point.- C’est donc quelqu’un des tiens; Car vous ne m’épargnez guère, Vous, vos bergers, et vos chiens; On me l’a dit : il faut que je me venge. Là-dessus, au fond des forêts Le loup l’emporte, et puis le mange, Sans autre forme de procès.
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Le roux et la gnôle
Le raisin le plus fort est toujours le meilleur : Nous l’allons goûter tous en choeur. Une nonne se déshabillait Dans le couvent des âmes pures. Un roux survient à jeun qui cherchait la biture, Et que la femme du bon Dieu attirait. Prends moi au paradis et même davantage Dit le gros rouquin tout en nage ; Tu seras délivrée de toute éternité. Bigre, reprends d’la gnôle, tu l’as bien méritée Dit-elle en lui servant un verre ; Les mots du rouquin la sidèrent Elle s’en va se déshabillant Tout en courant, Ses dessous de vingt ans sur elle Qu’à part le Père Vincent, aucun autre garçon N’avait vu enrober sa toison. Tu vois double reprit l’abbesse cruelle Et je connais tes mots quand tu es aviné Comment l’aurais-je su, l’aurais-je deviné ? Reprends d’la gnôle jett’ toi un dernier verre Si j’me nettoie, ça f’ra l’affaire. Même pas besoin, l’envie quand tu nous tiens ; À l’amour comme à la guerre Vous m’hébergerez sous vos reins Bonne eau de vie, vient de bonnes vendanges Là-dessus, toujours très pressé Le roux l’embroche et se vidange. Il risque fort de l’engrosser.
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